LE DOSSIER VALMY (Thriller) : chapitre 26 (Troisième partie)

in #roman6 years ago


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Chapitre 26 • Faux et usage de faux


En juin 2007, la société est définitivement par terre. Certes, nous avons mis de l’argent de côté avec les allemands, mais concrètement, nous n’avons plus rien à faire. Il y a bien quelques contacts venant du Japon ou de Russie, mais la motivation n’y est plus. La perquisition, c’était la goutte de trop.

Avec Patrick, nous avons fait nos calculs. On peut encore se payer six mois et ensuite on fermera la boite définitivement. Lui va avoir le nombre de trimestre pour partir en retraite confortablement et moi j’ai déjà commencé à me reconvertir. Je vais en normandie deux à trois jours par semaine. Chez Denis.

Tout le monde y trouve son compte. Il est à la bourre dans tous ses dossiers et moi j’ai besoin d’apprendre, avec ma légendaire capacité de travail. Et comme j’apprends vite, je vais lui remettre en ordre de marche son cabinet en quelques mois. J’assiste aux réunions en tant qu’assistant mais concrètement, je fais tout : les convocations, les compte-rendus, les rapports et surtout la facturation. Denis est ravi, l’argent coule à flot à nouveau dans son cabinet. Et moi je suis prêt pour changer de vie. Mes adversaires ont eu raison de ma boite, mais ils n’auront pas ma peau!

En septembre 2007, je décide de confier le sort de l’entreprise française au Tribunal de Commerce d’Amiens qui comme d’habitude va se révéler exceptionnel. C’est Maître LAFARGE qui est chargée de poursuivre puis liquider l’entreprise. Je lui ai tout préparé avec mon expert comptable. Tout est au cordeau. Elle m’en félicite d’ailleurs dans l’entretien obligatoire avec le dirigeant. Et nous évoquons les mémoires olfactives, elle de la baie de Somme, moi de ma Bretagne au lieu de parler de la société. elle sait qu’on est allé au delà de nos ressources. Elle est admirative même.

Quand on dépose le bilan, les charognards n’ont plus de limites. A commencer par les Ursaaf qui inventent des dettes. Bien vite remis en place par le liquidateur.

De toutes les manières, nous n’avions plus le choix. Les prud’hommes viennent de tomber. Les deux chimistes qui nous ont trahi viennent d’avoir gain de cause. 80,000 euros chacun. Quelle ode à la joie! Les sommes sont exigibles de suite que l’on fasse appel ou non. Et donc comptablement, nous ne pouvons plus faire face au passif exigible. On peut donc fermer tranquillement.

Dans le fond, tout cela me va bien. Ma reconversion est en cours. Avec l’accord des magistrats qui trouvent que ce tutorat est efficace et qui indiquent à Denis que je devrai bientôt recevoir mes propres missions.

En octobre 2007, je dois aller au Québec pour répondre à l’interrogatoire musclé prévu par mes adversaires. Et je réponds donc aux questions de l’avocat d’Alex. Et nous voilà revenu au début de mon histoire. Leur avocat pose les questions sous le contrôle de son client Alex, et moi je réponds sous le contrôle du mien. L’interrogatoire ne s’est pas déroulé comme ils l’avaient prévu et nous savons qu’ils souhaitent en terminer. Ma libération est donc pour bientôt. Quand soudain, le baveux d’Alex me demande d’examiner attentivement la pièce 1 de sa requête introductive, c’est à dire l’assignation de base. Il souhaite revenir sur ce point et je n’en comprends pas bien l’intérêt puisque nous l’avons déjà largement évoqué.

Il s’agit du document que j’ai envoyé à Mathieu en mai 2004 pour qu’il le lise dans l’avion. Au départ, rien à dire, c’est bien le document. Je m’étonne simplement que le mail l’accompagnant et disant «attention, ce n’est plus d’actualité mais par contre la technique est exacte» ait été supprimé.

L’avocat insiste et ne se démonte pas. Pour le moment. Il insiste sur les tableaux chiffrés qui font miroiter les perspectives et il me questionne pour bien montrer que son client y a cru. Problème? Bah oui problème. Les tableaux qui sont à la fin du document ne sont pas ceux de mai 2004 et pour cause. Ils ont été rédigés avec Alex en septembre 2004, alors que sa décision d’investir est déjà prise. Et comme amplement démontré, comme on dit là bas!

La pièce 1 est donc un faux. C’est un montage éhonté de plusieurs documents. Un an que j’ai cette pièce dans les mains et que je n’ai pas vu la supercherie. sincèrement parce que j’ai pensé qu’il s’agissait de l’original, donc, je n’y ai pas prêté attention. Un an que toutes les procédures s’appuient sur un faux.

Bricolé pour la circonstance, pensant probablement que faute de moyens, nous ne pourrions pas résister et que donc le forfait passerait inaperçu. Bah non, je suis toujours vivant et je réponds. Et c’est leur avocat dans sa volonté d’aveu qui va me permettre de découvrir le pot aux roses.

Quand on a tort, le plus simple est de fabriquer les documents qui n’existent pas. Les deux avocats demandent du off. La greffière qui prend en sténo stoppe la prise de notes. Mon avocat enchaîne :

  • on a un gros problème là confrère.

  • Ouais...

L’avocat du gros cabinet n’en mène pas large et se tourne vers Alex. Il faut comprendre qu’au Québec, l’avocat a l’obligation de vérifier les pièces de ses clients. sinon sa responsabilité est engagée. En France, ce genre de détails est futile. L’avocat ne peut être mis en cause, et le client reste seul responsable des pièces communiquées.

En France, c’est le droit romain qui s’applique. Avocat, c’est littéralement «Ad vocare», celui qui parle pour. Avec pour conséquence que l’avocat n’est pas responsable des propos de son client. Outre atlantique, le système est différent et leur avocat comprend qu’il a produit un faux. Lui gros cabinet. Il va falloir faire une déclaration à son assurance. La journée se termine sur cet incident majeur. Le lendemain, l’interrogatoire reprend. Et d’entrée de jeu, l’avocat d’Alex veut communiquer de nouveaux documents.

Ceux que son client a véritablement reçu. Et qui ont été imprimés dans la nuit par Mathieu, preuve qu’il disposait encore à cette époque de tous les éléments sur les disques durs. Mon avocat est malin et profite de l’occasion pour dire:

  • confère, je souhaiterai que votre client qui est ici présent paraphe chacune des feuilles et authentifie le document.

Ce qu’Alex finit par faire de mauvais gré. Et nous voilà en présence d’un aveu judiciaire! Dans la journée, je transmets tous les documents à l’avocat français d’Amiens pour avoir un avis. Il s’agit bien d’un faux qui a été produit devant les juridictions d’Amiens. L’usage est donc également établi. On peut les attaquer au pénal en citation directe. Le reste de l’interrogatoire n’offre aucun intérêt sauf le plaisir d’Alex de m’emmerder. Au lieu de 15 jours, je ne vais en faire que 12 et cela m’arrange bien de rentrer plus tôt. Je suis épuisé.

De retour en France, je réunis le conseil d’administration. La citation directe contre Alex et Mathieu pour faux et usage de faux est votée. L’avocat d’Amiens a carte blanche et lance les significations. Un jugement aura donc lieu en début 2008 en principe.

Décembre 2007 nous en sommes donc là quand la justice canadienne va nous proposer de revenir avant Noël pour une mission de conciliation. Notre avocat local nous indique que nous n’avons pas trop le choix, et me revoilà reparti dans l’autre sens avec mon avocat luxembourgeois cette fois, car si nous devons trouver une transaction, ce sera au travers de la maison mère au Luxembourg, la filiale française étant sous tutelle judiciaire.

La mission de conciliation est programmée sur trois jours. Elle ne va durer que quelques heures. La juge est une femme très élégante, expérimentée aussi. Elle nous indique les modalités, elle ne jugera pas, elle est juste là pour faciliter les négociations.

D’entrée de jeu, Alex va hurler :

  • Si Madame la juge, on ne part pas du principe que je suis la victime, on arrête tout.

La juge va tenter à plusieurs reprises de le convaincre qu’il ne faut pas partir avec des aprioris. Elle a beau essayer de lui expliquer, c’est un fou furieux. A l’heure de la pose, je descends fumer. Mathieu aussi et il me rejoint sur le parvis. Nous discutons comme deux anciens copains. De tout et de rien. Je sais que si il n’y avait eu que Mathieu, rien de tout cela ne serait arrivé. Mais le chef c’est son père, alors, il écrase. Et son père a décidé qu’il aurait ma peau!

A midi, la juge est exaspérée. Elle n’en peut plus et constate qu’il ne peut y avoir de conciliation. Et la négociation s’arrête là. Et je reprends l’avion dans le sens inverse. Dans deux jours, c’est noel.


A SUIVRE

Table des matières:

Introductionchapitre 1chapitre 2chapitre 3chapitre 4chapitre 5chapitre 6chapitre 7chapitre 8chapitre 9chapitre 10chapitre 11chapitre 12chapitre 13chapitre 14chapitre 15chapitre 16chapitre 17chapitre 18chapitre 19chapitre 20chapitre 21chapitre 22chapitre 23chapitre 24chapitre 25


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