LE DOSSIER VALMY (Thriller) : chapitre 19

in #roman6 years ago (edited)


valmy.jpg


Chapitre 19 • Septembre 2006


Sur le chemin du retour, je ne peux m’empêcher de réfléchir sur l’identité du traitre. J’écarte Patrick d’entrée de jeu. Il n’a aucun intérêt à trahir, tout au contraire. La secrétaire, pareil. Si on se casse la gueule, elle va directement pointer à l’ANPE. Alors qui? Denis? Jeannot? Julie? Merde, j’en viens à soupçonner la mère de mes enfants...

Denis est euphorique. Le coup de Minova, c’est inattendu. Ma capacité de réaction et à trouver des solutions l’a bluffé. Jeannot est content. Il ne comprend pas tout mais du moment que je suis content, il l’est également. Julie est également contente pour moi mais sans plus. Il y a bien longtemps qu’elle en a marre de me voir me débattre comme un diable pour Valmy. Elle m’écoute par politesse. Je sens bien que notre couple en a pris un coup. A ce moment là, je ne mesure pas encore combien.

Les allemands vont tenir leur promesse. Les contrats sont signés et le virement arrive le 5 septembre. La société est provisoirement sauvée pour trois mois. C’est maintenant à nous de jouer.

Sur le plan technique, cette période est euphorisante. Patrick, le polonais et moi travaillons fort et avec une vraie complicité d’ingénieurs. L’ambiance au laboratoire est bonne. Très bonne même. La technologie, c’est cette capacité à combiner ce que chacun d’entre nous connait. Et l’alchimie fonctionne.

Patrick fabrique les résines sur les réacteurs dans le laboratoire du haut. De 2 à 5 kilos par jour, que je m’emploie à formuler en accord avec notre polonais dans le laboratoire du bas. Patrick m’a formé à tous les équipements de mesure et je caractérise donc tous les produits. Ce qui me manquait, je suis en train de l’apprendre. Et j’apprends vite. Très vite même.

La secrétaire aussi semble rassurée et de bonne humeur. Elle rédige toutes les fiches techniques sous la houlette de Patrick. Chaque semaine, je fais un compte-rendu par mail à Archibald sur nos avancées et comment nous dépensons l’argent en toute transparence.

Les résultats pleuvent et fin septembre 2006, c’est à dire en à peine un mois, les deux produits sont au point. Archibald est pressé de voir le résultat mais dans son propre laboratoire. Les tests définitifs auront donc lieu chez les allemands à la mi-octobre. Si c’est bon, ils nous doivent encore 100,000 euros et nous aurons rempli le contrat avec un mois et demi d’avance.

Non seulement, il vient de couillonner son concurrent avec une formule bien supérieure, mais il vient d’acquérir une nouvelle technologie totalement inédite, sans concurrence technique et trois fois moins cher que l’objectif fixé. il ne peut être que content.

A la mi-octobre, nous chargeons tous les produits dans la voiture et avec Patrick, nous prenons la route vers l’Allemagne. Cette fois, nous avons le droit de rentrer dans l’univers de Petra toujours aussi tendue, c’est à dire le laboratoire qui a été soigneusement rangé avant notre venue. Les paillasses sont vides de chez vides. Tous les produits ont été rangés de sorte que nous ne puissions voir ou connaitre le moindre additif qu’ils utilisent.

Chez VALMY, nous avons deux laboratoires. Un premier plateau qui sert à fabriquer les matières premières, faire des synthèses. Le deuxième plateau est un laboratoire de formulation. On mélange les produits et on teste les résultats. Les allemands ne possèdent que la partie formulation. Ils ignorent tout de la synthèse et sont donc prisonniers des fabricants de résine qui les assassinent au niveau du prix.

Bref, leurs paillasses sont vides. Impossible de savoir sur quoi ils bossent. Par contre, tous les équipements de mesure et de test sont sous tension. Patrick et moi déballons les produits et donnons les consignes au chimiste allemand. En live, il formule et la mousse gonfle. Elle est conforme aux attentes. La cinétique est bonne. La qualité leur plait. Les caractéristiques de résistance sont légèrement au dessus des objectifs. C’est tout bon jusque là! Archibald a le sourire à chaque fois que Olga revient avec les résultats.

Le clou du spectacle, c’est le test au feu. Extrêmement violent, il faut impérativement passer ce test pour que le produit puisse être vendu. Le laborantin allemand met le test en route. Tout le monde retient son souffle. Il faut attendre 15 minutes. Et bingo, le produit passe le test les doigts dans le nez!

Les allemands ne pipent pas un mot. Ils attendent l’avis du chef qui ne tarde pas à venir. Archibald me dit :

  • bravo mon ami!

Et objectivement, il a de quoi être content. Il décide de tester le deuxième produit dans l’après-midi mais il veut d’abord nous montrer quelque chose. Les ordres pleuvent en allemand et tout le monde s’exécute. Il nous montre leur nouveau produit qui fait un tabac depuis un an. Technologie différente mais résultats identiques. Patrick et moi sourions : sacré Archibald! Concrètement, il n’avait pas besoin de nous. Son produit est top et fait un carton. Mais c’est Archibald et il vient de prendre dix ans d’avance sur son concurrent français sans faire le moindre bruit. Nous comprenons aussi que tout ce que nous développons va rester soigneusement dans des placards, juste au cas où.

Son laboratoire doit lui coûter deux millions d’euros par an et pour seulement 10%, il vient de prendre dix ans d’avance. Il a l’honnêteté de le dire. Il est totalement en confiance.

L’après-midi, nous testons le deuxième produit. Là, ils sont totalement bluffés. Et forcément les allemands veulent savoir combien coûte ce bijou en fabrication. Ils avaient fixé l’objectif à 1 euro du kilo en pensant que c’était tout bonnement impossible puisque leur produit courant leur revenait déjà à 1 euro 80 pour du polyuréthane. Alors, j’ai laissé Patrick leur dire. Après tout, c’est grâce à lui! Il a le droit à son heure de gloire. Et il annonce : 45 centimes. Silence dans l’assemblée. Patrick est passé du statut de chimiste à messie en une minute. On échange un vrai sourire complice.

Archibald veut certifier le produit avant la fin de l’année. Cette technologie n’ira pas dans les placards, il compte prendre le marché seul. Il faut donc transférer tout le savoir faire à Olga et Petra qui commencent tout juste à se détendre. Le principe est simple : nous préparons toute la documentation et je viens une fois par semaine ici pour les aider à tout mettre en oeuvre. Les allemands se chargeront de l’industrialisation.

Archibald rigole. On a même le droit de continuer à améliorer le produit. Et si je reste plusieurs jours, je ne dormirai plus à l'hôtel mais chez lui. Grand chasseur devant l’éternel, il m’invite même à une partie de chasse pour la mi-décembre.

De toutes les personnes que je vais rencontrer dans le projet VALMY, c’est Archibald qui me marquera le plus. De l’intelligence à tous les étages, humain et avec un sourire ravageur, on ne peut être que sous la charme de cet homme d’honneur qui force le respect. Un malin aussi. Quelques mois plus tôt, il a rencontré son concurrent en Suisse et ils ont trouvé un accord de partage. Pour le moment, tout le monde respecte le pacte et les affaires vont bien. Mais Archibald ne fait pas confiance aux français et c’est pour ça qu’il nous fait bosser secrètement. Pour avoir dix coups d’avance.

Pour la première fois dans mes affaires, je suis en confiance. Et je ne cache rien à Archibald qui nous paye la deuxième tranche de 100,000 euros sans discuter. Je n’ai pas perdu de vue que nous allons rediscuter la poursuite de notre collaboration en décembre pour l’année 2007.

Nous reprenons la route avec Patrick le coeur léger. Tant qu’à être en Allemagne, nous testons le V6 de 230 chevaux de ma voiture et roulons à 200km/h. Notre conclusion est unanime : à cette vitesse, cela commence à défiler. Ce retour sera mémorable. Euphorisé par notre succès, je me sens poussé des ailes. Quand à un péage français, nous découvrons les douanes. Le préposé me fait un signe de la main. Voiture sportive, de grosse cylindrée allemande, immatriculée au Luxembourg avec deux mecs dont un pas rasé, nous sommes une cible idéale qui viendrait de hollande. Je sais que nous n’avons rien à nous reprocher mais que nous avons une petite blague pour nos amis douaniers.

Sur le côté, le douanier contrôle nos papiers. Et mon permis français lui va bien. Ca sent d’entrée de jeu la bonne affaire. Il me demande donc si nous ne transportons rien d’illégal. Patrick n’est pas très rassuré. Et j’attaque ma blague du jour sans me démonter :

  • d’illégal? Ah je ne crois pas. Qui vous intéresse, je ne sais pas.

Il n’en fallait pas plus au douanier pour nous demander de descendre et d’ouvrir le coffre. Patrick sourit jaune et me dit: ce que t’es couillon! Et j’ouvre le coffre. Là, le coffre contient nos bidons et des sacs de produit. En tête, celui de silice blanche qui a légèrement coulé. Le douanier fait un pas en arrière, met la main sur son arme et appelle ses collègues. Si c’est bien ce qu’il pense, il fait la prise de sa carrière.

Nous sommes priés de reculer et de nous expliquer. J’annonce la couleur : microsilice pulvérulente. La fiche technique est sur le côté. Le chef douanier s’en empare. Il mouille son doigt et ramasse quelques poussière échappées du sac. Il renifle et je lui indique qu’il peut mêmee goûter le produit, c’est ce qui sert à la composition des dentifrices. Et le bonhomme s’exécute devant bien admettre qu’il n’allait pas monter au septième ciel. Dix minutes plus tard, nous reprenons la route avec Patrick qui reprend légèrement des couleurs. Moi, je me suis bien marré. Mais il est temps de rentrer car si les allemands sont contents et nous aussi, nos adversaires ne nous ont pas oublié et l’automne 2006 est riche en rebondissements de ce côté là!


A SUIVRE!

Table des matières:

Introductionchapitre 1chapitre 2chapitre 3chapitre 4chapitre 5chapitre 6chapitre 7chapitre 8chapitre 9chapitre 10chapitre 11chapitre 12chapitre 13chapitre 14chapitre 15chapitre 16chapitre 17chapitre 18


ligne.jpg

You want to follow my work? Welcome aboard!

ligne.jpg

bandeau_steemit.jpg

Coin Marketplace

STEEM 0.18
TRX 0.13
JST 0.029
BTC 56847.11
ETH 2970.63
USDT 1.00
SBD 2.29