LE DOSSIER VALMY (Thriller) : chapitre 22 (& fin)

Si je vais officiellement en Allemagne pour une partie de chasse invité par mon partenaire, il y a surtout les discussions sur le nouveau procédé.

Comme nous avons terminé le premier contrat, Patrick et moi avons entrepris d’autres travaux. D’abord CPCU avec lequel nous avons repris contact. Ils ne sont pas opposés à de nouveaux essais mais ils veulent que les produits soient d’abord testés dans un laboratoire indépendant. Leur responsable m’a même dit:

• tes adversaires sont logés à la même enseigne.

Tiens tiens, ils auraient remis en place une structure? Cela m’étonne fortement mais bon, tout est possible.

Mais plus que CPCU nous avons mis au point la plus importante des technologies de l’ère VALMY. Le truc que tout le monde cherche sans trouver depuis 20 ans. Pour bien comprendre, les résines phénoliques ont deux défauts. D’abord, elles contiennent du formol libre et chacun sait que le formol, c’est bof bof, voire même cancérigène. Le législateur a fixé 1% maximum. Et ce n’est déjà pas beaucoup. D’un autre côté moins il y a de formol, et moins la résine est réactive et plus elle vieillit vite. En 4 semaines, à 20 degrés, cela devient du béton. C’est ce qui s’était passé dans la machine non rincée en Pologne.

Ces deux problèmes ont longtemps freiné le développement des phénoliques. Mais le législateur n’a que faire des problèmes techniques, la santé publique est prioritaire et se profile à l’horizon 2008 une nouvelle barre de 0,1% à atteindre.

Les trois gros producteurs mondiaux de résine n’ont aucune solution. Mettre les résines à 0,1% de formol libre, c’est diminuer la durée de vie des résines par dix ou alors avoir des résines totalement inefficaces.

Et pourtant avec Patrick, nous avons trouvé une solution qui sans coût supplémentaire permet de descendre en dessous de cette nouvelle limite. Les premières études de vieillissement montrent que la durée de vie des produits pourrait dépasser l’année, soit 12 fois les résines actuelles et sans baisse de réactivité. Autant dire que le procédé vaut un sacré paquet.

Tout part d’une discussion à la con. Pour enlever le formol libre en fin de fabrication de résine, on ajuste avec de l’urée. L’urée cela ne coûte pas cher mais par contre, cela fait vieillir la résine plus vite. Ca, c’est ce que tout le monde fait. Patrick depuis longtemps voulait essayer un autre produit, un vrai piège à formol : le consol.

Il en avait même parlé en 2005 mais les deux autres avaient balayé cette solution en disant que cela coûtait une fortune. Là Patrick est seul et il veut refaire des essais. Pas de soucis de mon point de vue.

Il m’explique le principe. Le consol c’est un trinitro méthane quelque chose. Bref, tout sauf sympathique ce genre de produit, très volatile et qui en plus coûte une fortune. Et c’est là que j’ai une idée qui va permettre d’aboutir au procédé.

Et si au lieu d’ajouter le consol à la fin de la fabrication, on l’ajoutait pendant la réaction, et notamment pendant la phase de distillation? On récupère le distillat et hop on rebalance dans la résine et on continue ainsi de suite. On recycle les déchets qui contiennent encore du consol jusque épuisement du formol par passe successive. De la dichotomie pour ainsi dire.

Patrick trouve l’idée géniale. Aussitôt dit, aussitôt fait. Il lance la fabrication sur deux kilos. Pendant que la résine se fabrique, il m’apprend à me servir des instruments de qualification en formol libre et ceux pour mesurer la viscosité de la résine.

Le premier résultat est bluffant. Les résultats dépassent nos espérances. Le formol est à 0,005... La résine est super liquide, super réactive et nous lançons un vieillissement accéléré pour étudier ce dernier point.

Nous testons même les formulations et les émissions de formol pendant le moussage. Rien. Les drager n’arrivent pas à mesurer un taux aussi bas.

Dans les mines, il fait chaud. Les résines vieillissent vite et le formol libre qui se dégage étouffe les ouvriers. Avec notre procédé, tout cela est réglé. Les allemands ne peuvent qu’en vouloir.

J’ai d’ailleurs informé Archibald de notre découverte fin novembre et je lui ai transmis les premiers résultats en me gardant bien de lui dire comment nous nous y sommes pris. il ne m’a pas dit j’achète, mais c’est tout comme.

Le soir, j’arrive chez Archibald après cette longue réunion avec Kojak. Olga aussi est là. Elle dort chez Archibald également. Gentleman, je lui laisse la chambre d’amis et j’indique que je dormirai dans le salon. Les chasseurs sont des hommes à toute épreuve. On rigole bien et on s’enfile quelques bières.

Olga est heureuse. Elle se confie. Au début, Petra et elle ont eu peur de nous. On venait sur leurs platebandes. Mais avec le temps, elles ont appris à nous apprécier. D’ailleurs, quand je vais chaque semaine au laboratoire pour former les allemands, Petra ne fait plus ranger le labo. Elle me fait même la morale sur ma quantité de cigarettes!

La partie de chasse est grandiose. Cela ne ressemble pas du tout à ce que je connais, ni en chasse individuelle ni pour la chasse au gros. C’est à part. Archibald a voulu m’en mettre plein les yeux et me remercier à sa façon. Tous ses gros clients sont là aussi. Mais il me place à chaque fois aux meilleurs endroits. Olga n’est jamais bien loin et ce week-end est un pur bonheur. En partant, Archibald me fait écouter un live de Dire Straits. Dans sa grosse berline, le son est divin. Il me souhaite un bon retour et comme nous apprécions la même musique, il me tend une copie de ce que nous avons écouté.

Ce qu’Archibald apprécie chez moi, c’est l’honnêteté, la capacité de travail hors norme, la capacité à résister à mes adversaires. Cela force son respect.

Négocier le prochain contrat dans de telles conditions n’est que pur bonheur. Surtout quand tu as en main un carré d'as: le fameux procédé.