LE DOSSIER VALMY (Thriller) : chapitre 25 (Troisième partie)

in #roman6 years ago (edited)


valmy.jpg


Chapitre 25 • La machine à broyer


Vers 14h00, le grand con arrogant du début a fini d’éplucher mon ordinateur. Bien entendu, il n’a rien trouvé et pour cause.

Le plus ironique, c’est que je ne sais toujours pas ce que l’on me reproche sauf à priori une escroquerie à la TVA alors que l’Etat me doit 110,000 euros de crédit d’impôt. J’ai bien vu qu’ils ont une ordonnance donc un jugement mais ils refusent catégoriquement que j’en prenne connaissance. J’en fais la remarque au grand con de façon violente et vulgaire :

  • vous avez le droit de m’ausculter le trou du cul par décision de justice, mais je n’ai pas le droit de la lire. Ca me rappelle mes années en Afrique, au moins là bas, les sbires comme vous ont la pudeur d’appeler ce genre de méthode par son nom : un régime dictatorial.

Il ne répondra pas. Il baissera les yeux et fera semblant de continuer son travail. Quant au fond, je pose clairement la question à la vieille.

  • Mais enfin tout cela n’a pas de sens. Vous connaissez déjà l’entreprise puisque nous sommes agréés. Il n’y a aucune déclaration manquante, on a même obtenu de vos services le label: jeune entreprise innovante et vous nous devez 110,000 euros... Et puis les seuls mouvements de fond viennent du Luxembourg vers la France, pour magouiller on a trouvé mieux, non?

  • Oui, oui, je vous comprends Monsieur Le Roy. Les 110,000 euros vous seront payés.

L’inconfort est palpable. 15h00, ils s’enferment tous dans la salle de réunion. Cela va durer une heure trente. Ils ressortent la mine basse. Il est plus que probable qu’ils ont discuté d’une sortie honorable, laquelle est pour le moins difficile. Comment justifier 30 fonctionnaires pour rien? Au final, ils impriment le procès verbal qu’Adeline et moi même devons signer. Ils ont trois cartons de document saisis, tous plus inintéressants les uns que les autres. Le grand con arrogant m’explique qu’ils vont tout numériser et nous rendre les documents très vite. Qu’il va y veiller personnellement. Ils sont tous debout, prêts à partir.

La vieille me tend la main et me dit :

  • désolé, sincèrement désolé.

Je ne lui rends pas sa poignée de main, je la fusille du regard:

  • vous devriez avoir honte Madame.

Elle s’incline et passe la porte. Et ils défilent tous sous mon nez, les yeux baissés. De retour dans la cuisine, je serre Adeline dans mes bras en m’excusant pour ce qu’elle vient de vivre. Je sais qu’elle ne m’en veut pas mais elle pleure. Elle a eu peur. Elle vient de voir à 20 ans ce que l’Etat peut faire de pire. Je la libère en lui indiquant qu’elle peut prendre une journée de congé et qu’elle ne s’inquiète pas :

  • vous êtes brillante Adeline et vous avez été incroyable aujourd’hui! Patrick et moi vous aideront pour la suite de vos études.

  • Merci Monsieur Le Roy… je ne sais pas comment vous faites pour leur faire face comme vous faites.

  • Je n’ai rien à me reprocher Adeline… C’est ma seule force.

Patrick et les allemandes ont également fini leur programme. L’ambiance est lourde et pesante. Patrick me donne le programme pour le lendemain. En principe, je devais dîner avec les filles. Olga me dit:

  • rentre chez toi Vincent. Va embrasser ta femme et tes enfants. Nous, on va se débrouiller.

Les larmes nous viennent tous. Je reprends donc la route vers Paris. Julie et les enfants sont à table quand j’arrive. Ils ont le sourire alors que je m’inquiète pour eux.

  • vous n’avez pas eu peur les enfants?

C’est Tristan, huit ans à l’époque qui me répond:

  • non, mais en informatique, ce sont des quiches papa, il a fallu que je leur montre comment on imprime sur le wifi.

L’anecdote est énorme. Julie me raconte comment ça c’est passé pour elle. Ils ont débarqué brutalement à 7h15, sans sonner et alors que tout le monde était en train de se lever pour aller à l’école. C’est Marine qui les a vu les premiers sur la terrasse. Par la fenêtre, ils vont lui demander d’aller chercher maman. Qui était sous la douche. Ils ont tout fouillé aussi et forcément, ils n’ont rien trouvé. Ils ont aussi pu constater que l’on vit chichement, pas de tableaux de maîtres au mur mais les auréoles des fuites en toiture que nous n’avons toujours pas fait réparer. Ce n’est pas la misère chez moi, mais bon, ce n’est que du ikéa, et encore pas tout jeune.

Elle aussi a entendu les conversations internes, l’embarras de ne rien trouver d’illégal et rapidement la gêne. Je sais qu’elle ne m’en veut pas. En fait, elle s’en fout, elle est déjà ailleurs. Elle devait même s’attendre à ce genre de choses avec mon mode de vie… Sauf qu’aujourd’hui, cela ne la fait plus rire, elle assure le ménage et m’écoute avec bienveillance.

J’ai appelé mon père pour récupérer mes deux fusils de chasse. Bien entendu il va s’y refuser catégoriquement. Jusque là, toutes leurs procédures ne m’avaient jamais inquiété car je pensais fermement que la Justice me sauverait. Là, il va me falloir deux ou trois jours pour refaire surface. J’ai récupéré les ordonnances émises par les juges des libertés d’Amiens et de Versailles et qui ont autorisé les perquisitions et que je n’avais pas le droit de lire. Tout n’est qu’un tissu de conneries qui était vérifiable sans déployer autant de moyens. Le dossier a été habilement monté par la DNEF sur base d’une dénonciation anonyme du 26 avril 2006 qui suspecte une escroquerie à la TVA entre la France et le Luxembourg. Le jugement indique qu’en effet la société VALMY ne dépose pas ses comptes en Yougoslavie… Et que donc en effet, les craintes sont légitimes. Mais comment peut on écrire une telle demande et comment un juge peut être aussi con? Tout cela sur la base d’un courrier sans preuve… Ecrit le jour de la mutinerie, un an plus tôt.

Je retrouve les propos de Kojak. Et je me dis comme Archibald qu’il a fallu de sacrés relations très haut placées pour arriver à déclencher toute cette armada. Denis est sur la même longueur d’onde. Il n’y a que les franc maçons pour obtenir de telles largesses… Et trouver un juge qui accepte de signer les ordonnances.

Quinze jours plus tard, la DNEF rappelle. Ils ont fini de tout numériser et je peux venir rechercher mes documents. Denis a décidé de m’accompagner et nous nous dirigeons vers Pantin. L’accueil est très cordial. L’un des sbires se pose en interlocuteur et nous fait signer les papiers de décharge en essayant de détendre l’atmosphère au maximum. Le big boss du service rentre dans la pièce alors que nous avons tout récupéré. Il tient à nous raccompagner personnellement. Dans l’ascenseur, il nous présente au nom de l’administration ses plus sincères excuses.

Ses excuses, il peut se les mettre où il veut. Je n’en veux pas. On ne peut pas tout excuser. La corruption et l’imbécilité ne sont pas pardonnables. Je ne leur pardonnerai jamais.

Je n’en ai pas pour autant fini avec l’administration fiscale qui va me convoquer à deux reprises en 2007. Le dossier a changé de service curieusement. Les deux fonctionnaires qui ont mené le dossier initialement ne sont plus nos interlocuteurs. Le premier rendez-vous a lieu dans le 17ème. Dans un bocal, ils sont deux. La discussion va très vite:

  • Monsieur Le Roy, on a tout vérifié et tout est en ordre. Ce rendez-vous est formel. Il fait partie de la procédure pour recueillir vos propos. Vous allez bientôt recevoir un blanc pour toutes vos sociétés.

Un blanc dans le jargon du fisc, c’est un papier laconique qui dit: « après vérification, il n’y a pas lieu à une rectification fiscale».

Et je vais en effet recevoir un blanc pour chacune de mes sociétés, y compris pour la luxembourgeoise. Pas un mot d’excuse, rien, juste un papier laconique. Sur le plan opérationnel, les allemands vont respecter leur contrat. Jusqu’en juillet 2007, ils paieront les 450,000 euros. Mais pour eux, l’histoire s’arrête là. D’un côté, ils ont déjà ce qu’ils cherchaient alors pourquoi continuer. Pourquoi essayer de sauver un bateau aussi pourri...?

Certes, nous avons un peu d’argent de côté mais qui sera vite englouti par les avocats. En juillet, je reçois le réquisitoire supplétif. Le parquet d’Amiens transfère le dossier à Paris au prétexte que la réunion du 26 avril 2006 s’est déroulée à Paris. C’est habilement mené pour se débarrasser du dossier. Dans les faits, le parquet d’Amiens n’a jamais envoyé quoi que ce soit à Paris. Et par voix de conséquence, la juge d’instruction ne peut bosser que sur le volet informatique. Là aussi, il faudra bien un jour m’expliquer comment un service de l’Etat peut se livrer à de telles magouilles. Tous mes avocats ont écrit au parquet d’Amiens et de Paris. A 6 reprises. Nous n’aurons jamais de réponse.

C’est à cette époque que Denis va prendre la bonne décision. Son idée est simple : on ferme proprement toutes les boites, les unes après les autres et je viens travailler avec lui en Normandie comme Expert de Justice. Il me formera. Il ira voir les magistrats pour que j’ai des missions.

Doucement mais sûrement, je prépare ma reconversion.


A SUIVRE

Table des matières:

Introductionchapitre 1chapitre 2chapitre 3chapitre 4chapitre 5chapitre 6chapitre 7chapitre 8chapitre 9chapitre 10chapitre 11chapitre 12chapitre 13chapitre 14chapitre 15chapitre 16chapitre 17chapitre 18chapitre 19chapitre 20chapitre 21chapitre 22chapitre 23chapitre 24


ligne.jpg

You want to follow my work? Welcome aboard!

ligne.jpg

bandeau_steemit.jpg

Coin Marketplace

STEEM 0.17
TRX 0.12
JST 0.027
BTC 61023.73
ETH 2948.98
USDT 1.00
SBD 2.51