La révolution du jardin.
Un jardin laisse tranquillement pousser ses fleurs, les rongeurs et les oiseaux sont présents en grands nombres.
Un matou y vie en roi.
Les chats sont des animaux solitaires et territoriaux. Il aime garder le contrôle : le jardin leur appartient et leur doit tout. L’univers lui-même a créé les souris pour nourrir les chats. C’est écrit dans leur livre à eux. Certes, ils pratiquent toujours la chasse sportive, mais ça fait environ 5 000 ans qu’ils n’en ont plus vraiment besoin : ils ont domestiqué les humains.
C’est bien le meilleur coup qu’ils ont plus faire. Ils ont domestiqué ces belles grosses bêtes travaillantes qui ramènent des proies impossibles : porc, bœuf, thon, etc. La joie! Les humains ne demandent que des caresses et des ronronnements.
C’est fou à quel point ces grands singes sont faits pour avoir des maîtres et les servir. Ils ont créé des technologies permettant de réduire leur temps de travail et se plaignent maintenant qu’il n’y a pas assez de job. La crise du chômage qu’ils appellent. Pour passer le temps, ils inventent des emplois inutiles et se créent des besoins. Une chance que les chats sont là pour être les maîtres.
Bon, trêve de politique, revenons à notre histoire.
Le matou solitaire aime bien être le seul propriétaire des biens de son domaine. Il a les humains, la maison, la cour, les caresses et les souris pour lui seul. Un autre chat en transit pénètre dans le jardin. C’est un concurrent qui cherche à prendre de l’expansion. Les souris avaient tellement l’aire bonne sur ce terrain-là. En plus, un bol de croquettes traine sur le balcon. Bien entendu, le chat propriétaire n’est pas content de voir la concurrence qui arrive : il s’élance pour chasser le mal venu. L’arrivant crache et le matou arrête à quelques centimètres de l’intrus. Les deux solitudes se regardent et se défient. Aucune coopération possible. La scène dure longtemps, très longtemps.
Il y a des ressources pour permettre à deux individus de vivre dans cette cour, mais le jardin est trop petit pour accueillir les désirs d’un seul d’entre eux.
Les chiens sont des êtres sociaux. Ils sont travaillants. C’est eux qui ont été domestiqués par les humains qui, eux-mêmes, ont été domestiqués par les chats… (Vous suivez toujours?) Bref, dans la lutte des classes, les chiens ont certainement perdu. Avant, ils travaillaient pour les humains : ils s’occupaient des moutons, tiraient des traineaux, surveillaient le territoire, faisaient fuir les prédateurs. Depuis quelque temps, les chiens sont aux chômages. Pour ne pas qu’il y ait de scandales, les humains les ont réassigné au poste d’animaux de compagnies. Comme ça, chat et chien semblent égaux. Ça, ça veut dire que les canidés poirotent toute la journée sur le divan, prisonnier du domicile, sans savoir comment fonctionne la télévision. Les chats, eux, sortent par la chatière. Quand les humains arrivent du travail, les canidés ont le droit de sortir 1 h en compagnie du travailleur. Les humains appellent ça une tâche. Bien entendu, tout ça, alors que les chats ont le droit de sortir sans surveillance. Triste, la vie de chien.
Revenons à notre histoire, encore une fois.
Un humain marche dans la rue. La travaillante bête tente « d’optimiser son temps ». En pleine crise de l’emploi, seuls ceux travaillant comme deux peuvent avoir une job puisqu’il n’y a pas assez de travail pour tout le monde : logique. Donc, cet humain chanceux de travailler essaie de contrôler ses deux chiens surexcités d’être enfin dehors, tout en tenant deux sacs à crottes pleins, en marchant, en machant de la gomme, et en répondant au texto full urgent du patron. Sans blague, j’étais accotée sur un arbre en me demandant si mon chat allait finalement envahir le territoire du voisin, tout en composant cette histoire sur le capitalisme dans ma tête quand l’homme que je décris plus haut m’a foncée dedans.
Les deux chiens ont aisément réussi à se déprendre de l’emprise de leur maître lors de la collision décrite ci-haut. Les animaux sociaux semblaient déterminés à coopérer pour fuir ce système oppressant pour leur race. Ils courraient dans tous les sens. Leur museau sentait l’odeur de la liberté.
Depuis la collision, les deux félins n’agissent plus comme des ennemis. Le danger n’est plus le contrôle de ressources supplémentaires. Le danger, c’est les chiens qui tentent une rébellion. Les chiens sont forts, costauds, ils ont des dents solides. En fait, ils sont plus forts que les chats, mais ils l’ignorent. Les félins souhaitent que les choses restent ainsi.
Les deux êtres solitaires sautent ensemble sur le balcon pour fuir les chiens qui courent aléatoirement, librement, dans la cour de mon voisin. Les félins se rassemblent pour protéger LEUR bol de nourriture. Côte à côte, solidairement, les deux individualistes protègeront leur main mise sur la cour, la ruelle et la gamelle.
La suite m’a fait penser à une fable de Lafontaine.
Si ta liberté sent les nuggets de poulet, demande-toi qui tient ta laisse. Nos naïfs chiens sociaux en fugues ne connaissent pas Lafontaine. L’odeur des croquettes à saveur de poulets pour chats arrive à leurs nez. Les deux chiens courent vers le bol qui n’est défendu que par deux boules de poils qui font le dos rond. Les canidés n’ont qu’à se mettre ensemble et ils auront le contrôle de la gamelle
Pendant un court instant, les chats étaient certains que la révolution des chiens allait marcher : les conditions gagnantes étant du côté des canidés Ils s’attendaient à être mangés avant le contenu de la gamelle. Sauf qu’arrivé en face des félidés et des croquettes, l’estomac de chacun des chiens a pris le dessus sur leur sens stratégique. L’estomac étant une entité individualiste, aucun des chiens ne voulait partager le futur butin.
Alors, avant de gagner contre leurs adversaires, les deux amis se sont mis à se battre pour savoir qui serait le héros de la révolution.
Les humains interviennent pour reprendre le contrôle des canidés devenus un danger à l’ordre établi. Une ration de nourriture supplémentaire a été offerte aux deux chats effrayés comme dédommagement.
Comme quoi les ressources appartiennent à ceux qui collaborent, qu’ils soient solidaires ou solitaires.
1. Cette histoire est vraiment agrandie pour montrer beaucoup, beaucoup de textures.
2. @mcfarhat je n'oublie pas ton défi, j'ai juste oublié de ne pas mettre d'explication. J'imagine qu'une fable est une explication .
Mon Dieu ça sort de ton esprit tout ça ? Ton article est fou je le garde sous le coude je reviens lire ça dans quelques minutes !! Trop bien pour être lu à la va vite !
"Garder sous le coude", c'est a mon tour d'apprendre une expression!
Une fois encore nous sommes sous le charme de votre plume ! Upvoté à 100% !
Merci beaucoup!
Énorme ton article ^^, très bien écrit :D.
:D
Et en plus, lu à haute voix par la compositrice. Trop bien :D
J'ai tellement du fun à conté au gens ^^
Si seulement c'était un métier payant!
Texte magnifique et en même temps, pour lequel je ne suis en accord le l'idée politique. Ça rend le truc encore plus croustillant 🤣.
Juste un truc, tu utilises individualiste au lieu de égoïste. Mais les deux mots n'ont pas le même sens.
L'individualisme défini l'individu comme le plus petit groupe. L'égoïsme défini une manière de faire au détriment des autres.
Georges Brassens était individualiste et sûrement pas égoïste.
Sinon. Bravo.
Wow! Meilleur commentaire jusqu'à maintenant. Le mot égoïste ne m'est même pas venu en tête en fait!
J'aimerais savoir: quel idéologie politique croits-tu que j'ai exprimer et en quel idéologie aurais-tu préféré voir?
Aucune idéologie en particulier en fait. C'est surtout la manière de présenter négativement l'automatisation du travail et le fait de l'associer au chômage qui me chagrine. Il y a du vrai, mais ça déplace la fonction principale du travail. On ne travaille pas pour travailler mais pour rendre un service à la communauté et à son prochain.
Je me doute que ça fait parti du jeux de la métaphore.
Mais ne t'en fait pas, je ne souhaite forcément lire des choses en accord avec "mon" idéologie.
Je trouve ça extrêmement intéressant parce que dans ma tête l'automatisation du travail n'a rien de négatif ni dans cette histoire ni ailleurs. En fait, ce que je pensais dire c'est: nous avons créer des technologie permettant d'alléger nos vies en même temps, on ne change pas le système pour permettre de diminuer le temps de travail. Et en fait, je me réfère plus au bullshitjob.
" On ne travaille pas pour travailler mais pour rendre un service à la communauté et à son prochain."
J'espère, c'est vraiment ce que je souhaite. En tout cas, c'est toujours ce que j'essais d'avoir comme boulot.