Rencontres avec l'Afrique : Chez les Dogon de Bandiagara
Aventures Maliennes
En vacances à Bandiagara, au pays Dogon, en décembre 1994, j’étais hébergé chez l’instituteur. Un hôte parfait qui en plus d’un accueil fabuleux dans sa famille me faisait découvrir son peuple et sa région. Un vieux monsieur avec qui je prenais le thé chaque matin m’initiait à la culture Dogon, la sienne. Belle et complexe, complexifiée peut-être, mais belle malgré tout.
La valeur des mots
Les Dogon ont avant tout une culture animiste, incluant fortement le culte des ancêtres. Ils croient en un Dieu unique nommé Amma qui créa la terre et la pris comme épouse. Ils eurent des jumeaux qui enseignèrent la langue aux huit ancêtres nés d’un couple qu’Amma avait réalisé dans la glaise. Un mélange de religion et de mythologie qui explique simplement l’origine du peuple. Le tout, donnant lieu à de nombreuses festivités, inutile de le préciser.
Les Dogons recherchent l’harmonie, cela se retrouve dans le quotidien. Les salutations dont je parlais dans l’article précédent montrent l’intérêt que l’on a pour l’autre. D’autres exemples sont intéressants voir surprenant pour nous. Les femmes félicitent les hommes, les hommes remercient les femmes, les jeunes montrent leur affection pour les vieux qui mettent en valeur les actes et les contributions des jeunes. Les Dogons ont un rapport assez étrange avec une autre ethnie, les Bozos. Ils se moquent réciproquement les uns des autres mais se doivent mutuelle assistance, un peu comme les Français et les Belges.
Ainsi se déroulaient mes petits déjeuners à Bandiagara, entre mystique et réalité, tradition et religion, mystère et sens pratique. Les randonnées avec Pierre, mon hôte attentionné, n’en étaient pas moins intéressantes.
La falaise lieu de vie et de mort
Les Dogons vivent sur le plateau et dans la falaise même. Des villages isolés aux accès escarpés. C’est là que m’amenait Pierre, par de petits chemins nous atteignions de beaux villages de taille variée mais d’architecture comparable pour le néophyte. On s’arrêtait dans la maison des amis ou de la famille, boire du thé, parfois manger un peu. Les maisons sont généralement construites autour de la cour, un peu comme pour un patio Andalou, les chambres, la cuisine et les greniers donnent sur la cour.
Dans un village nous avons fait le marché. Il a lieu une fois par semaine, c'est-à-dire tous les 5 jours en pays Dogon. Dans un autre nous avons était invités à une compétition de lutte traditionnelle, un sport répandu chez les jeunes garçons, une ambiance à tout casser mais beaucoup de respect entre les adversaires.
D’autres fois, le soir, le conteur racontait et tout le monde, jeunes et moins jeunes, écoutait passionnément. Je ne comprenais pas le sens mais j’aimais ces moments de détente, bercés par les paroles et la fatigue de la journée. J’étais impressionné par la façon dont le griot captait l’attention et captivait une assistance aussi hétéroclite.
Pour les curieux il faut lire Amadou Hampâté Bâ. Il a mis par écrit les comtes de la tradition orale Africaine, ceux qui se passaient de génération en génération, le soir autour du feu. Pour éviter qu’ils ne se perdent dans la modernité. Ces comtes, très imagés, font intervenir les animaux, ils sont pleins de bon sens et se lisent à plusieurs niveaux. Les enfants s’en amusent, les vieux en philosophent. Hampâté Bâ a aussi écrit deux livres autobiographiques qui sont un enchantement si vous aimez l’Afrique de l’ouest. C’est du Pagnol Malien, facile à lire, amusant, souvent émouvant.
Premier volume de la vie d'Amadou Hampâté Bâ
Un peu comme je l’avais décris pour Madagascar, les rites funéraires sont ici aussi longs et importants. Au moment du décès le mort est lavé puis placé à l’air libre dans les failles de la falaise. Monter le corps n’est ni simple ni sans risques, un travail d’alpiniste. Quelques mois plus tard on célèbre les funérailles qui permettent à la famille de faire son deuil. L’âme, tout ce temps, reste aux alentours du village. Enfin, dans une cérémonie pouvant durer plusieurs jours, les âmes de toutes les personnes décédées au cours des derniers mois sont appelées à rejoindre les ancêtres. Les masques sortent, dansent et défilent dans le village. C’est la fin du deuil.
Les failles en haut où sont placés provisoirement les morts
La situation politique s’est améliorée les années suivantes, le pays Dogon s’est ouvert, il est devenu le site le plus visité d’Afrique de l’ouest. Les Européens arrivaient à l’aéroport de Bamako pour être pris en charge par des 4*4 de luxe et amenés en quelques heures. Deux ans plus tard, le parking plein de touristes, propres et enturbannés comme il se doit, admirait ma R4, centre d’intérêt majeur, bête rare parmi les énormes 4*4 des agences de voyage.
Certains enfants n’allaient plus à l’école, devenant guide un beau matin, attirés par l’argent facile. Certains encore vendaient leur porte, leur fenêtre, des sculptures parfois ancestrales. Evidemment c’était un apport de devise pour le village qui en avait besoin, chaque chose à ces deux faces.
La roue tourne et aux guerriers Touareg ont succédés d’autres, plus dangereux et mieux armés.
Merci pour ce bel article que je viens de découvrir !!
J’aimerais tellement faire le
Voyage que tu as eu la chance de faire il y a quelques années! Merci de nous faire découvrir ce peuple.
Tu le feras ... après l'Amérique du sud pleine de supers coins également.
Tout simplement magnifique ! Upvoté à 100% !
Un grand merci @francosteemvotes