Rencontre avec l'Afrique : Le pays de l'homme intégre

in #fr6 years ago


Burkina Faso

Au nord il y avait le Burkina Faso, l’ancienne Haute Volta, dont la capitale porte le doux nom de Ouagadougou. Un pays pauvre et enclavé, avec un des 10 moins bon Indice de développement Humain de la planète encore en 2015. Cependant c’est un pays où l’on aime aller pour son peuple particulièrement sympathique.

Mais l’histoire commence en Côte d’Ivoire car nous avons choisi de nous rendre au Burkina non pas par la route, comme d’habitude, mais par le train. Il y a un vieux train, chaotique et plein de charme qui part d’Abidjan pour atteindre Ouagadougou et même un peu plus loin me semble t-il. Le temps de trajet est assez imprécis, on parle de 24h ce qui n’est jamais le cas.

La lenteur du déplacement et le tracé de la voie unique permet d’apprécier un paysage passant doucement de la forêt tropicale au Sahel. Le plus intéressant se passe à l’intérieur des wagons, un mélange de personnes que le hasard vous offre.

* * * * *

Si l’on aime le confort, ce n’est pas l’idéal, mais si l’on cherche à vivre une belle aventure humaine c’est l’idéal. En effet le voyage est une petite aventure en soi. On sait quand on part mais pas quand on arrive ni même si on arrivera jusqu’à la destination prévue. On s’y prépare au mieux sans échapper aux surprises.

« Ce n’est plus l’aventure comme au temps des 1er locomotives » me cris un employé alors que j’attends l’arrivée du train. Il y avait dans le temps, une locomotive à vapeur. Ça c’était l’aventure, les passagers devaient parfois descendre du train pour monter certaines côtes, il fallait charger la chaudière au maximum et foncer, souvent s’y reprendre plusieurs fois. On mettait également régulièrement le feu à la savane et il fallait arroser les wagons qui étaient en bois pour les protéger des brindilles enflammées projetées par la locomotive. Il semble regretter ce bon vieux temps, il aurait de fantastiques souvenirs à me confier. Malheureusement ces responsabilités l’appellent et c’est à grands coups de sifflet qu’il me quitte soudainement.

Bonne surprise au départ, il y a peu de monde. On m’avait décrit un train bondé et nous sommes relativement á l’aise. Quelques coups de sifflets plus tard nous voilà partis. Les haltes se succèdent embarquant quelques passagers que je soupçonne clandestins. Chaque halte est une occasion commerciale, par les fenêtres les deux mamas de notre compartiment font entrer toute sorte de produits : ananas, bananes, poules et d’autres choses plus mystérieuses, le nécessaire de voyage. Je suis devenu garde enfant pendant les opérations de négoce, sans le choisir, on m’a jeté un bébé dans les bras en me remerciant. Une heure après on ne peut plus bouger ! On commence à réaliser que 24h, cela va être long !

Passés les faubourgs d’Abidjan, un paysage de forêt luxuriante nous accompagne. La chaleur est intenable dans notre espace encombré. La climatisation a fonctionnée le temps de sortir de la gare, sans importance, les odeurs des marchandises embarquées, incluant notre abondante transpiration, obligent à laisser les fenêtres ouvertes. Hormis trois ou quatre poulets dont le sort est incertain, les autres êtres vivants semblent heureux d’être du voyage.

A notre petit rythme, d’arrêts commerciaux en arrêts mystérieux, nous montons vers le Burkina. Souvent on descend du train faire quelques pas, acheter à boire ou à manger, vaquer à d’autres besoins urgents, plus agréables à satisfaire dans la brousse que dans les toilettes. Pas d’inquiétude à avoir quand le train repart on peut le suivre en marchant et ré embarquer facilement. La forêt devient progressivement savane.

Heureusement les conversations sont passionnantes, en plus des deux mamas qui sans en donner l’apparence font fonctionner d’une main de fer un commerce florissant, nous avons un agriculteur, le descendant d’un roi local, un guérisseur moitié sorcier et une chanteuse. On pourrait écrire un livre sur la vie de ces gens, même si la version contée oscille entre désir et réalité, ça ne me les rend que plus attachants.

Il fait déjà nuit quand nous arrivons à la frontière. Fini le demi sommeil conquit de haute lutte. Police, douane, dans le train, hors du train, papiers, vérification des bagages. Le grand jeu d’une frontière d’autant plus sérieuse qu’elle n’existe que depuis l’après guerre.

Burkina-Faso signifie, dans un mélange de langues locales : Le pays de l’homme intègre. Cela pourrait prêter à sourire dans cette sous région Africaine des années 90. Pourtant alors que j’attendais pour faire les formalités, j’entendis un dialogue singulier entre une dame et un policier. Le 1er expliquait qu’il fallait payer 100 francs CFA pour un formulaire obligatoire. La dame répondait qu’elle n’avait que 50 CFA, méthode de négociation classique. La négociation aurait du suivre pour s’achever à 75 ou 80. Je tendais l’oreille étant le suivant dans la file. La réponse fût immédiate, sans brutalité mais sans discussion: « Madame je n’ai pas de formulaire à 50, seulement celui à 100 ». Bienvenue au pays des hommes intègres.

Tout intègre qu’elles soient, les formalités n’en étaient pas moins longues. C’est plusieurs heures plus tard que nous commencions à rouler au Burkina. La 1er ville rencontrée s’appelle Bobo-Dioulasso. Rien que pour le nom, nous ne pouvions éviter un arrêt. Nous avons quitté le train et nos compagnons de voyage. A regret on faisait parti du voyage. Je ne sais pas combien de temps il aura mis cette fois mais plus prêt de 36 heures que des 24 prévues. Presque 35 km/h de moyenne, parait-il que ce n’était pas si mal.

Bobo-Dioulasso, Bobo pour les intimes, est une petite ville très sympathique. La campagne environnante est plutôt agréable pour cette latitude oú le Sahel commencera bientôt à revendiquer ses droits. Les nuits sont intenses, les journées nous allons flâner dans les collines environnantes et se baigner dans une jolie cascade. Il faut bientôt repartir car notre objectif est Ouagadougou et son célèbre festival du cinéma Africain.

* * * * *

Un taxi brousse nous amènera par une des seules routes goudronnée du pays jusqu’à la capitale en fête. Le voyage, assez long bien entendu, nous permettra, grâce à des compagnons de voyage très versés sur la culture et l’histoire de leur pays, d’en apprendre d’avantage.

Le train fût une expérience fatigante, comme souvent les transports en commun de la région, mais réellement un beau souvenir, une petite tranche de vie. A renouveler …

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Magnifique épopée et expérience comme toujours ! Upvoté à 100% !

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