Le miel et la science

On m’avait dit quand j’étais jeune que le miel était le seul aliment qui ne se périmait jamais, qu’un pot de miel était bon à vie. J’ai vécu avec cette croyance jusqu’au jour où j’ai commencé à avoir un esprit critique. Je me suis demandé si c’était vraiment vrai.

Bon, certes, ce n’est pas la seule croyance que j’ai remise en question avec le développement de mon esprit critique. Cependant, c’est certainement la remise en question la plus mignonne que j’ai eue.

Donc, un mercredi soir après l’école, je demande à mon père : « C’est tu vrai que le miel c’est mon tout le temps? Est-ce que ç’a été testé cette affaire-là? »

Au lieu de me donner une réponse tout cru dans le bec ou de me dire « demande à Google », mon père me demande comment est-ce que je peux faire pour trouver la réponse. Sans m’en rendre compte, je propose un protocole qui ressemble à la démarche scientifique tel que présenté aux élèves du primaire et secondaire. Ma procédure établie un peu pour me sauver de l’heure de la vaisselle était très simple et plutôt « boboche »

1. Mettre du miel dans un pot trempé préalablement dans l’eau bouillante
2. Le fermer pendant au moins 82 ans (l’espérance de vie d’une femme au Québec)
3. L’ouvrir et tester si le miel est comestible selon les moyens qui seront disponibles à ce moment-là.

Je me rends bien compte de la bobochitude de la démarche. Surtout qu’elle ne me permettra sans doute pas d’avoir une réponse à ma question avant ma mort. Et, en 2009, Google existe. Il est clair que des scientifiques ont déjà fait cette démarche. 30 secondes avec Google et je pourrai lire le compte-rendu des élites, ceux qui savent pour vrai.

C’est là qu’arrive le moment plus important de l’histoire.

Mon père me dit : « La science est une démarche que l’on fait maintenant pour savoir demain. »

Et bien, finalement, j’ai fait ma petite expérience broche à foin. Je la traine précieusement avec moi. Le pot de miel a trainé dans tout les garde-manger que j’ai utilisés jusqu’à présent. Après tout, c’est pratique d’avoir du miel impérissable seulement s’il l’est dans nos maisons.

Cette expérience symbolise pour moi le fait que le savoir n’a pas à appartenir à une élite. Une ado le jour du poisson d’avril peu décider qu’une question idiote n’est pas une blague et qu’elle peut trouver le moyen d’y répondre.

C’est aussi le symbole de la transmission du savoir. C’est mon père qui m’a poussée à faire cette expérience. Je la transmettrai à mes futures enfants (ou à ma nièce si je n’en ai jamais) pour que ceux-ci puissent compléter l’expérience avec leurs propres enfants (ou n’importe quel jeune de leur entourage).

Cette expérience du pot de miel est surtout une expérience sur la transmission de la démarche scientifique.

Pour qu’un résultat soit considéré comme valide, une même démarche doit-être reproduite plus d’une fois. N’hésitez donc pas à reproduire l’expérience du pot de miel avec les enfants de votre entourage en expliquant la démarche derrière.

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